• Le Journal de Jeanne

    Le journal de Jeanne 


    1940

    Cher Journal,

    Aujourd'hui, c'est un grand jour, avec Joseph, nous nous sommes mariés à la mairie, sans grande cérémonie. Joseph doit partir avec Georges à la guerre. J'espère qu'il ne leur arrivera rien, cela m'ennuierait d'être veuve avant d'avoir pu profité de mon mari. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Pendant que je jouais un morceau sur le piano familial, Joseph jouait avec Pierre, son petit frère, j'aime les voir jouer ensemble, ils sont tellement complices que parfois, je les envie. Cette insouciance alors que la France gronde sous les balles ennemies. 

    Je n'ai jamais connu une telle complicité dans ma famille, mes parents étaient trop stricts. Pour eux, c'était les corvées et les études avant tout. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Les hommes sont partis au front, la guerre est cruelle. Nous sommes encore épargnés, mais ma belle-mère est vraiment tendue. Elle a déjà vécu cela il y a vingt-cinq ans, elle a peur de perdre son mari et son fils.

    Georges a aménagé la cave pour nous protéger en cas d'attaque. Quand la sirène se déclenchera, nous descendrons au sous-sol.
    Ce n'est pas facile d'être enfermé, mais personne ne sait où nous nous trouvons à part Georges et Joseph.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Cela fait quelques mois que nos hommes sont partis se battre. J'ai appris ma grossesse sans vraiment savoir que j'étais enceinte, c'est Antoinette qui me l'a dit. Elle a vite fait le calcul.

    Même si nous ne risquons rien pour le moment et afin de nous protéger, elle a souhaité que nous passions nos nuits dans la cave.

    Elle est très humide, mais Antoinette a tout nettoyé, du sol au plafond. Les lits ne sont pas très confortables et les couvertures ont connu des jours meilleurs, mais les draps sont propres.

    J'ai écrit une lettre à Joseph pour lui annoncer ma grossesse. Même si je ressens sa peur dans ses mots, cela me fait du bien de le lire. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    J'en suis à six mois de grossesse, les nausées matinales sont enfin passées. 

    Nous dormons toujours à la cave. Antoinette appréhende l'arrivée de l'automne, nous n'aurons aucune source de chaleur et l'humidité va s'intensifier, mais elle refuse que l'on dorme dans la maison. Si nous sommes bombardés alors que l'on dort profondément, nous ne serons pas à l'abri.

    La guerre s'approche de nous. Je n'ai toujours pas reçu de lettre de Joseph, et cela, m'inquiète. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    1941

    D'après les calculs d'Antoinette, je ne devrais plus tarder à accoucher. D'un côté, je suis contente de mettre au monde mon bébé et d'un autre triste qu'il naisse dans les circonstances actuelles.

    J'ai reçu la lettre de mon Joseph et quand j'ai lu la cruauté de nos ennemis, cela me peine énormément. Savoir qu'il n'est pas à l'abri comme nous le sommes. 

    Mes nuits sont agitées, souvent Antoinette me retrouve dans un coin de la cave en pleurs.

    La journée, nous la passons dans la maison. Je joue du piano et je m'évade le temps d'une balade de Bach. Antoinette peint pendant la sieste de Pierre. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Alice a fêté son anniversaire, elle est devenue une belle jeune fille. Malheureusement, elle n'ira pas à l'école. Antoinette a appris qu'elles étaient toutes fermées, du coup, c'est elle qui enseigne à sa fille.

    Moi, je suis plus grosse que jamais, la peur de mettre au monde des jumeaux m'a pris, mais ma belle-mère m'a dit que Joseph était un gros bébé à la naissance et que le mien devait sûrement être comme son père. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Les douleurs, telles des épées que l'on m'enfonçait dans le ventre, m'ont pris dans la matinée. Heureusement, Antoinette est restée avec moi. Alice s'occupait de son petit frère. 

    J'ai énormément souffert, la peur de la guerre et celle de perdre la vie en mettant au monde le fruit de notre amour, mais j'ai donné naissance à une petite fille, Madeleine, Marie, Antoinette. Marie, c'était le prénom de ma maman.

    Je suis épuisée, mais je dois écrire à Joseph pour lui annoncer qu'il est papa. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    1942

    Après avoir subi des attaques dans les environs, avoir dormi dans la cave et avoir eu très peur, nous avons réintégré la maison. La Bastide a été épargnée, Dieu soit loué. 

    Nos hommes vont nous rejoindre bientôt pour une permission. J'ai hâte que Joseph rencontre notre Madeleine qui a soufflé sa première bougie. 
    Avec Antoinette et Alice, nous avons briqué la maison pour qu'elle soit propre avant l'arrivée de nos hommes.

    J'ai tellement hâte de m'endormir dans les bras de mon Joseph. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Les hommes sont enfin là. Serrer Joseph dans mes bras m'avait vraiment manqué. 

    Il a joué et câliné sa fille. Au début, elle a eu un peu peur, mais rapidement, elle a charmé son papa. J'ai hâte que cette guerre se termine et que l'on puisse de nouveau être une famille. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Antoinette était plus que ravie de voir Georges dans la maison, elle l'a touché partout pour s'assurer qu'il n'avait pas de blessures. Mon beau-père a beaucoup ri avant de la prendre dans ses bras.

    Pierre a joué avec son papa et il n'arrêtait pas de lui demander des histoires sur la guerre. 

    Pour quelques jours, nous sommes une famille unie et heureuse d'être ensemble. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    1943

    Cela fait un mois que les hommes sont repartis et notre intimité avec Joseph a porté ses fruits, un petit bourgeon grandit en moi.

    Madeleine fête ses trois ans, et comme elle marche, nous avons dû verrouiller le portail pour qu'elle ne s'échappe pas hors du jardin. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    1944

    Il n'y a rien eu de particulier cette année. Pierre a obtenu de bons résultats à l'école depuis qu'elle a réouvert. Alice s'est mise à fond dans le sport, surtout courir, elle adore ça. 

    Antoinette regarde le temps qui passe trop vite et compte les jours où elle et mon beau-père seront de nouveau réunis.

    Moi, je protège mon petit bourgeon qui grandit. J'explore des recettes avec les ingrédients frais du potager, j'adore cuisiner. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Marie est enfin propre, il lui aura fallu du temps et surtout beaucoup de patience. Elle déteste se coucher, tous les soirs, c'est une bataille pour l'endormir. Par contre, elle est très curieuse et adore apprendre de nouvelles choses. Sa grand-maman est ravie de lui apprendre des mots, à dire pardon ou encore s'il vous plaît et merci. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    1945

    La guerre est enfin finie. Joseph et Georges vont rentrer dans peu de temps. Antoinette est vraiment heureuse et rassurée par leurs retours. Georges va pouvoir reprendre en main son jardin, elle a mis beaucoup d'énergie à l'entretenir, je l'aidais au maximum, mais les journées étaient trop courtes et honnêtement, le jardin, ce n'est pas mon truc. 

    Marie a eu un an, elle est très remuante et adore être portée. De mon côté, j'ai eu dans l'idée de chercher un poste de cuisinière, mais je n'ai rien trouvé, il faut que j'attende encore que la guerre soit derrière nous et que la France se reconstruise.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Alice a fêté son anniversaire et vu son niveau d'études, elle a souhaité s'inscrire à l'université. Antoinette est triste de voir sa fille quitter la maison, je ne m'imagine pas à sa place. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Ce soir, j'ai organisé un repas de Noël. Après la guerre, j'avais envie que l'on se retrouve tous ensemble. En plus, c'est le dernier noël de cette décennie, la semaine prochaine, nous fêterons la nouvelle année et l'entrée dans une nouvelle décennie, l'an 1950. 

    J'aimerais donner un fils à Joseph et perpétuer le nom des Leroy, mais dans l'immédiat, nous allons déguster cette belle dinde.
    Joyeux Noël à tous et que la paix soit dans tous les cœurs. 

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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